1 – Les droits des minorités ethniques

WILL BIDEN MAKE AMERICA GREAT AGAIN ? OU L’IMPACT DE L’ÉLECTION DE JOE BIDEN SUR LES DROITS HUMAINS

17 novembre 2020

La justice raciale est affichée comme une des 4 priorités du duo Biden-Harris, avec le climat, la crise économique et la lutte contre le Covid-19. Durant 4 longues années, les droits humains ont été bafoués sur le territoire américain. Le résultat des élections présidentielles des Etats-Unis signe le départ d’un Président affichant des valeurs racistes et xénophobes mais aussi un soutien à des groupes violents d’extrême droite, et marque l’accueil d’un Président qui se veut unificateur. 

Joe Biden représente la répétition du schéma de l’élite des dirigeants dont l’électorat s’est lassé. Un riche homme blanc de plus de 60 ans, en politique depuis des dizaines d’années. Malgré un programme séduisant, il a pris le risque de s’allier à une femme métisse, issue de l’immigration de parents jamaïcain et indien, pour s’assurer les votes d’un bien plus grand nombre d’électeurs. Choix audacieux car c’était proposer une personnalité qui rompt avec la tradition par 3 caractéristiques : une femme, Noire et Asiatique. Ce choix de sa part – et surtout, de la part des électeurs car pour beaucoup ont plus choisi la colistière que le candidat – démontre une ouverture d’esprit et un appel à un changement radical, mais il ouvre également la voie aux personnes issues de minorités.

Le « squad » composé de 4 jeunes femmes élus au Congrès depuis 2018 a déjà contribué au changement du visage de l’Etat avec Alexandria Ocasio-Cortez, d’origine portoricaine, Ilhan Omar et Rashida Tlaib, deux femmes musulmanes respectivement d’origine somalienne et palestinienne, et Ayanna Presley, une Afro-Américaine. Véritable miroir de la transformation progressive du peuple américain, leur élection comme représentantes au sein de la branche législative démontre toute la diversité et l’acceptation qui se sont formées tant bien que mal pour affronter le White Supremacism de groupes comme les Proud Boys, le néo nazisme, le néo Ku Klux Klan, mais aussi le terrorisme, les crimes haineux, les violences policières, la discrimination systémique, accentués par Trump qui a largement contribué à fragmenter les Etats-Unis comme cela n’avait pas été le cas depuis de nombreuses années.

Une reconsidération des droits des Natifs américains

Les Natifs américains et les tribus auxquelles ils appartiennent , habituellement absents des bureaux de vote, ont cette année soutenu massivement le duo Biden-Harris qui affiche le respect dû à cette communauté qui, encore aujourd’hui, souffre d’une mise à l’écart restrictive de leurs droits.

Cette communauté marginalisée depuis 1492 demande simplement la protection de leurs terrains contre une mainmise des Etats ou du Gouvernement, le respect de leur souveraineté en tant que Conseil Tribal reconnu officiellement au niveau national, de leur environnement et un accès à la santé. 

L’homme qui sera le plus vieux Président des Etats-Unis a su se montrer compréhensif envers les autochtones.  Il a établi un “Plan pour les Nations Tribales” de façon à restaurer leurs droits notamment en leur redonnant accès à des positions importantes au niveau fédéral, en les faisant participer à la démocratie du pays via la nomination de juges Natifs Américains et le retour de conférences dédiées à la Maison Blanche pour leur donner la parole. Son plan d’action inclut des services de santé plus développés. Les Natifs font partie de ceux qui ont le moins accès aux soins aux Etats-Unis, et sont même victimes de mauvais traitements lorsqu’ils sont patients d’hôpitaux publics. A savoir que les premiers habitants du continent sont 3 fois plus victimes du virus que le reste de la population. Parmi ses mesures, il projette également de mettre un terme à la violence domestique grandissante dans les réserves, et leur permettre d’exercer librement leur droit de vote.

Partisan du mouvement pour renommer le Colombus Day, Indigenous People’s Day – la journée nationale controversée qui glorifie la colonisation du continent initiée par Christophe Colomb, en fermant les yeux sur les atrocités afférentes – avant même sa campagne présidentielle, Biden s’est rangé en faveur du rétablissement des droits des Natifs américains.

Quid de la communauté asiatique ciblée depuis la découverte du Covid-19 ?

Les communautés d’origine asiatique et des îles du Pacifique n’ont pas une histoire de cibles du racisme telles que l’ont été les Noirs et les Hispaniques, mais n’en sont pas moins des victimes du racisme ordinaire. Les Américains d’origine asiatique sont soit pleinement assimilés – et donc on fait abstraction de leur identité asiatique qui n’est pas acceptée-, soit mis à l’écart au vu de leurs oppositions culturelles et idéologiques avec l’Amérique. 

L’actuel Président blâmait directement la communauté chinoise pour la pandémie mondiale en utilisant les termes de “virus chinois”. Son opinion a largement contribué à attiser une haine anti-asiatique depuis l’année dernière. Tout ceci s’ajoutant à la méfiance et aux soupçons d’espionnage ou de complot dûs aux rivalités sino-étasuniennes exacerbées par la guerre commerciale que se livrent les dirigeants des deux pays.

Sous Obama, Biden a contribué à améliorer leur qualité de vie avec l’Initiative pour les Droits des Américains Asiatiques et des Îles Pacifiques qui propose notamment des programmes fédéraux pour leur insertion, leur éducation. Il a aussi tenu à dédommager les vétérans philippins via une compensation financière longtemps espérée. 

Sa colistière a des origines d’Asie du Sud car sa mère est indienne. Ainsi, tout comme les membres de cette communauté nous pouvons espérer plus de compréhension des cultures de cette région du monde, et donc plus d’acceptation des Américains d’origine asiatique qui se manifestera par une baisse du racisme.

Le mouvement Black Lives Matter

Une réelle émancipation des Noirs, un mélange des cultures, une cohabitation pacifique dans le respect de chacun, c’est ce que rêvent de vivre des millions d’Américains. Ou plutôt rêvaient. A présent, l’Amérique fait face aux extrémistes des deux côtés de la balance.

Joe Biden et Kamala Harris sont pleinement conscients du poids du vote des Afro Américains dans leur victoire à la présidentielle. Ils l’ont déclaré à plusieurs reprises, en reconnaissance des attentes et des besoins de cette minorité ethnique, il est attendu d’eux qu’ils prennent des mesures effectives de lutte contre la discrimination systémique qui met en danger la vie de millions de citoyens.

Il y a tout juste 2 semaines, des manifestations se sont déroulées à Philadelphie, non sans débordements. Walter Wallace Jr., un homme Noir de Philadelphie, un policier a donné l’ordre de l’abattre alors qu’il aurait été en pleine crise psychologique. Le nom de cet homme s’ajoute à une bien trop longue liste de victimes oubliées par le système judiciaire mais pas par les Américains.

Quelles ont été les mesures et principes défendus par Kamala Harris depuis son entrée dans le monde politique ? 

“La vérité et la justice sont en danger” : Kamala Harris. 

Ses parents se sont battus pour les droits civiques, ils faisaient partie du NAACP (National Association for the Advancement of Colored People) à ses débuts. Elle a grandi dans une communauté noire, entourée d’activistes. Depuis toujours, l’une de ses priorités est la réforme de la justice pénale pour mettre fin aux inégalités basées sur des préjugés raciaux et de genre. Kamala a appuyé le fait qu’elle souhaite transformer ce système pénal qui ne prend pas les sanctions nécessaires à la fois de manière individuelle contre les agents de police qui ne respectent pas loi en outrepassant leurs prérogatives, notamment via un usage excessif de la force (devenant donc eux-mêmes des criminels). Mais surtout en profondeur, par la création d’un registre national de répertorisation des agents ayant commis des actes illégaux ou encore en interdisant des techniques d’interpellation pouvant causer la mort telles que le plaquage ventral. Elle a dédié sa carrière à réformer le système judiciaire criminel pour plus de justice et d’égalité : dès sa sortie d’université elle a été substitut du Procureur, puis Procureure, puis Sénatrice afin de pouvoir améliorer la justice en y étant au cœur.

Quelles sont les nuances à apporter par rapport aux idées défendues par Harris et Biden? 

Kamala Harris a pu être sévère dans certains jugements qu’elle a rendu en tant que procureure. A savoir que jusqu’à récemment elle n’a jamais dénoncé les violences policières et appelle même à plus de funding, ce qui pose un problème dans le sens où cela fait opposition à une importante partie des militants et partisans du mouvement Black Lives Matter qui a initié la revendication Defund the Police, demandant à couper les fonds de la police à la fois pour les sanctionner et pour leur faire prendre conscience du ras-le-bol général face aux “bavures” croissantes et ciblées.

Concernant le futur Président,  une réserve a pu être émise sur son implication contre l’égalité réclamée par les Afro-Américains par le passé. Il aurait émis une opinion contre la déségrégation dans les bus scolaires (busing) à l’époque où des mesures anti-ségrégation concrètes étaient mises en place, 20 ans après l’arrêt  Brown v. Board of Education marquant la fin de la ségrégation dans les écoles. En plus de cela, en 1994 il soutient une loi contre la criminalité qui a engendré l’engorgement des prisons et l’incarcération de masse des hommes Noirs et hispaniques telles qu’on les connaît aujourd’hui.

Les deux mandats d’Obama n’ont en rien apaisé les tensions raciales menant aux violences policières qui ont causé la mort de centaines d’Afro-américains durant ces huit ans.

Comme on a pu le constater cet été avec la vague de protestation populaire contre les violences policières et les discriminations institutionnelles qui en sont souvent la cause,  faisant suite au meurtre de George Floyd, le combat contre le racisme mené aux Etats-Unis a une répercussion outre-Atlantique. Ainsi, en cas de réformes structurelles concrètes aux Etats-Unis, il serait plausible de voir de voir la France et le Royaume Uni imiter les Etats-Unis en ce sens.

Biden et Harris se sont rapprochés des familles de Jacob Blake et George Floyd, et Biden a d’ailleurs tenu à s’excuser des actes commis par des agents de police qui se sont basés sur l’origine ethnique pour employer l’usage excessif de la force jusqu’à la mise à mort de ces hommes.

Le respect des droits des Hispaniques 

La communauté hispanique représente 61 millions d’Américains soit 18% de la population. Historiquement, les personnes d’origines d’Amérique Latine comme ceux des Caraïbes sont victimes d’un type de discrimination similaire à celui des Afro-Américains. 

L’administration Trump n’a cessé de persécuter les Hispaniques, déjà même durant sa campagne de 2016, notamment avec le célèbre slogan “Build That Wall !”, ses raccourcis racistes reprenant les traditionnelles craintes de l’extrême droite et ses mesures violentes contre l’immigration (légale ou non). La question du respect des droits de cette minorité étant fortement liée à celle de l’immigration latinoaméricaine, une partie y sera dédiée dans un prochain épisode développant la question des droits humains avec les Etats extérieurs.

Yasmina Saindou, membre de l’ADHS

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