Au cœur des conflits armés : La tragédie silencieuse des enfants

Le DIH, un ensemble de règles et de principes essentiels, constitue le pilier fondamental des règles applicables aux Etats belligérants en temps de conflit. Il vise avant tout à limiter les souffrances des civils, à protéger leur dignité et à préserver leurs droits fondamentaux lors de situations de guerre ou de conflit armé. Cette branche du droit international se concentre sur l’atténuation des effets néfastes des conflits armés, en cherchant notamment à réglementer les méthodes et moyens de guerre pour réduire autant que possible les conséquences dramatiques sur les populations civiles.

Au cœur de ces préoccupations se trouvent les enfants, une partie de la population parmi les plus vulnérables et les plus touchées lors des conflits armés. Leur protection devient une priorité centrale du DIH, reconnaissant leur fragilité physique, psychologique et leur besoin spécifique de sécurité. En effet, les Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels de 1977 accordent aux enfants un régime de “protection spéciale”, on peut citer notamment l’article 77 : « Les enfants doivent faire l’objet d’un respect particulier et doivent être protégés contre toute forme d’attentat à la pudeur. Les Parties au conflit leur apporteront les soins et l’aide dont ils ont besoin du fait de leur âge ou pour toute autre raison. »1 Ces lois et conventions visent à garantir des protections spécifiques pour les enfants confrontés aux horreurs des guerres, par le biais de mesures interdisant leur recrutement dans les forces armées, exigeant des soins médicaux adaptés, préservant leur accès à l’éducation, et interdisant toute forme de violence, d’exploitation ou de traitements inhumains et dégradants à leur encontre. On retrouve par ailleurs dans l’article 38 de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant (CIDE) cette disposition fondamentale : “Les Etats parties s’engagent à respecter et à faire respecter les règles du droit humanitaire international qui leur sont applicables en cas de conflit armé et dont la protection s’étend aux enfants.” Ce traité a été adopté le 20 novembre 1989 par les Nations Unies et a été ratifié par 197 États. C’est le premier traité international à énoncer les droits de tous les enfants, il a inspiré de nombreuses modifications législatives dans la législation des Etats parties, affirmant plusieurs grands principes.

Malgré cette reconnaissance et ces tentatives de protection, la réalité est que les enfants continuent de subir des conséquences dévastatrices dans les théâtres de conflits à travers le monde. Les statistiques des violations des droits des enfants dans ces contextes demeurent préoccupantes, révélant l’urgence à renforcer les mécanismes de protection et à faire respecter le DIH pour préserver l’avenir et la sécurité des enfants. Aujourd’hui, les violations des droits fondamentaux des enfants dans les conflits armés restent élevées : L’UNICEF dénombre sur les 18 dernières années plus de 300 000 violations graves commises contre des enfants en période de conflit.2

La situation dans la bande de Gaza est un exemple particulièrement évocateur, puisque les droits fondamentaux des enfants y sont massivement violés. On dénombre environ 14 500 enfants tués et 12 300 enfants blessés. Au moins 17 000 enfants sont séparés de leurs parents et des milliers d’autres sont portés disparus. Les femmes et les enfants représentent 70 % des victimes. L’UNICEF qualifie la bande de Gaza comme l’endroit le plus dangereux au monde pour un enfant. À Gaza, pour le million d’enfants qui y vit, la réalité et le quotidien sont insoutenables.3

Cette réalité n’est malheureusement pas unique. Dans d’autres conflits mondiaux, les enfants subissent des situations tout aussi désastreuses. En Syrie, près de 8,5 millions d’enfants ont besoin d’aide humanitaire, et des milliers ont été tués ou blessés depuis le début du conflit.4 Au Yémen, après 8 ans de conflits, 11 millions d’enfants ont besoin d’une aide humanitaire, étant confrontés à la famine, aux maladies et aux violences continues. On compte également plus de 540 000 enfants de moins de cinq ans qui souffrent de malnutrition sévère voire mortelle, et un enfant meurt toutes les dix minutes de causes évitables selon l’UNICEF.5

De même, en Afrique, des pays comme la République démocratique du Congo ou le Soudan du Sud voient leurs enfants être recrutés de force comme enfants-soldats, subir des violences sexuelles et être privés d’éducation, compromettant ainsi leur avenir.

Il est impératif que la communauté internationale renforce ses efforts pour faire respecter le DIH, protéger les enfants des ravages des conflits armés et leur offrir un avenir sûr et viable. Sans cette protection adéquate, les conséquences dévastatrices sur la vie de millions d’enfants continueront de se faire sentir à travers le monde.

Asma Karoumi

Membre de l’ADHS

Bibliographie

1 « La protection juridique des enfants dans les conflits armés », Comité international de la Croix-Rouge :

https://ihl-databases.icrc.org/fr/ihl-treaties/api-1977/article-77#:~:text=1.,ou%20pour%20toute%20autre%20raison.

2 « 300 000 violations graves commises à l’encontre des enfants en zones de conflit au cours des 18 dernières années », UNICEF, article publié le 5 juin 2023 :https://www.unicef.fr/article/300-000-violations-graves-commises-a-lencontre-des-enfants-en-zones-de-conflit-au-cours-des-18-dernieres-annees/

3 « Israël-Palestine : les enfants, premières victimes de l’horreur », UNICEF, article actualisé le 12 avril 2024 : https://www.unicef.fr/article/israel-palestine-les-enfants-paient-le-prix-de-la-guerre/

4 « Guerre et conflit en Syrie : les enfants sont les principales victimes », UNICEF, article publié le 14 octobre 2022 : https://www.unicef.fr/article/syrie/

5 « Yémen : après 8 ans de conflit, 11 millions d’enfants ont besoin d’une aide humanitaire », UNICEF, article : https://www.unicef.fr/article/yemen-apres-8-ans-de-conflit-11-millions-denfants-ont-besoin-dune-aide-humanitaire/

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