« PLUS VITE pour vider l’Ile-de-France des populations précarisées », « PLUS HAUT vers l’exploitation des travailleurs sans papiers », « PLUS FORT dans la réponse sécuritaire contre les personnes à la rue »[1] pouvait-on lire sur les pancartes des militants réunis, dimanche 29 octobre dernier devant le bâtiment du Comité d’organisation des Jeux olympiques (Cojo) pour dénoncer le « revers de la médaille »[2] de l’organisation des JO à Paris.
Dans une lettre ouverte adressée au Cojo, aux athlètes et aux fédérations, les plus de 70 organisations à l’origine de cette mobilisation[3] ont détaillé les raisons de leurs inquiétudes. Elles mettent en garde contre le risque avéré de « nettoyage social » des rues, consistant à vider Paris des personnes sans-abris, des campements de migrants, des populations Roms occupant des bidonvilles, des travailleuses du sexe….
Alors que les JO de Paris se veulent « éthiques, responsables et durables », on recense de nombreuses mesures visant à désengorger la capitale des populations considérées comme indésirables : délogement des sans-abri, réduction des places d’hébergement d’urgence, fermeture des points d’accueil, diminution, voire tentative d’interdiction des distributions alimentaires… Depuis début septembre, plus de 1 700 personnes ont été transférées dans des « sas » d’hébergement d’urgence et temporaire en régions créés dans le but de vider l’Île-de-France. À ce titre, les associations pointent les conditions précaires des « mises à l’abri » aujourd’hui effectuées. Les demandeurs d’asile, réfugiés, mais également les sans-papiers (des personnes déjà déboutées), qui montent dans les bus et font l’objet d’un démantèlement de campement, ne sont aucunement informées des conditions d’accueil qui les attendent et perdent tout droit à l’hébergement si elles refusent ce qui leur est proposé. De plus, les associations s’inquiètent des effets de ce système, qui pourrait permettre selon elles de renvoyer dans leurs pays plus discrètement des migrants qui n’ont pas le droit de séjourner en France.
L’absence de prise en compte des personnes précaires, exclues tant du processus de planification des JO de Paris que de leur déroulement, mais bel et bien mobilisés sur les chantiers, engendre des conséquences désastreuses pour ces personnes dont les droits primordiaux sont déjà bafoués et entraîne une détérioration significative de leur niveau de vie. Ce phénomène n’est pas nouveau et s’inscrit dans la lignée des politiques visant les personnes les plus précaires, déjà en cours depuis longtemps, souligne Paul Alauzy de l’ONG Médecins du monde. Mais les JO 2024 constituent ici un véritable “accélérateur”.
Face à ces mesures, les organisations appellent les autorités à « garantir une continuité de la prise en charge des personnes en situation de précarité et d’exclusion, avant, pendant et après les Jeux » et demandent à intégrer les comités de pilotage des JO pour contribuer avec leur connaissance du terrain.
Cette lettre ouverte met en lumière la nécessité d’une réflexion approfondie sur l’impact social des grands événements sportifs et appelle à une prise en compte des populations vulnérables. Dans le cadre des JO de Paris, la défense des droits humains et la protection des populations vulnérables doivent être au centre des préoccupations, tout comme la protection de l’environnement.
Ghizlane DUNKEL
Membre de l’ADHS
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[1] Référence à la devise olympique qui se compose de trois mots latins « Citius – Altius – Fortius » signifiant « Plus vite – Plus haut – Plus fort ».
[2] Intitulé de la Lettre ouverte du 30 octobre 2023 : https://lereversdelamedaille.fr/
[3] Dont Emmaüs France, Ligue des Droits de l’Homme, Médecins du Monde, Utopia 56, Action contre la faim, Aides, Asile, Barreau de Paris, Solidarité et bien d’autres
